Philippe Goj : « La santé périnatale en France, un enjeu de santé publique à l’aube d’une décennie décisive »
La santé périnatale, englobant la période de la grossesse jusqu’aux premières semaines de vie de l’enfant, est un reflet essentiel du bien-être d’une société. Le rapport de surveillance de la santé périnatale en France pour la période 2010-2019, publié par Santé publique France, offre une analyse détaillée des tendances et des défis rencontrés dans ce domaine crucial. Alors que la France affiche des indicateurs de santé relativement élevés, des inégalités territoriales et sociales persistent, nécessitant une attention particulière. Cette tribune de Philippe Goj, président du Ciamt, vise à explorer en profondeur les résultats du rapport “Rapport de surveillance de la santé périnatale en France 2010-2019” par Santé publique France et à discuter des mesures à prendre pour améliorer la santé des mères et des enfants.
Philippe Goj : État des lieux de la santé périnatale en France
Des indicateurs globaux encourageants
Le rapport indique que la France maintient un niveau élevé de soins périnataux. En 2019, le taux de mortalité infantile s’élevait à 3,6 décès pour 1 000 naissances vivantes, un chiffre qui reste relativement stable par rapport aux années précédentes. Cependant, cette moyenne nationale cache des disparités significatives. Par exemple, certaines régions d’outre-mer affichent des taux de mortalité infantile pouvant atteindre 6 décès pour 1 000 naissances vivantes, soulignant l’importance d’une approche ciblée pour ces zones.
Les taux de prématurité sont également préoccupants. Environ 6 % des naissances en France sont prématurées, avec une incidence plus élevée dans les départements d’outre-mer. Ces chiffres mettent en lumière la nécessité d’améliorer les soins aux nouveau-nés et de réduire les complications associées.
Caractéristiques sociodémographiques des mères
Les caractéristiques sociodémographiques jouent un rôle crucial dans les résultats de santé périnatale. Le rapport révèle que l’âge moyen des mères à l’accouchement a augmenté, atteignant 30,5 ans en 2019. Cette tendance est souvent associée à une meilleure éducation et à un recours accru aux techniques de procréation médicalement assistée (PMA). Cependant, il existe une corrélation claire entre le statut socio-économique et les résultats périnataux. Les femmes issues de milieux défavorisés présentent un risque accru de complications pendant la grossesse et l’accouchement, note Philippe Goj.
Par exemple, le taux d’accouchements par césarienne est plus élevé dans ces populations, ce qui souligne l’importance d’améliorer l’accès à l’éducation et aux soins. En effet, près de 20 % des femmes enceintes ne bénéficient pas d’un suivi médical adéquat durant leur grossesse.
Les inégalités sociales et territoriales
Un gradient d’inégalités préoccupant
Le rapport met en évidence un gradient d’inégalités sociales qui impacte directement la santé périnatale. Les femmes vivant dans des zones rurales ou défavorisées ont souvent un accès limité aux soins prénatals et postnatals. Environ 20 % des femmes enceintes ne bénéficient pas d’un suivi médical adéquat durant leur grossesse, ce qui peut entraîner des complications graves pour elles et leurs enfants.
Les données montrent également que les femmes en situation de vulnérabilité sociale sont moins susceptibles de recevoir un soutien psychologique pendant et après la grossesse. Cela peut avoir des conséquences durables sur leur bien-être mental et celui de leur enfant.
L’impact du COVID-19 sur la santé périnatale
La pandémie de COVID-19 a exacerbé ces inégalités. De nombreuses femmes enceintes ont rencontré des difficultés pour accéder aux soins en raison des restrictions sanitaires. Une étude récente a révélé que près de 30 % des femmes ont reporté ou annulé leurs rendez-vous médicaux pendant la pandémie. Ce retard dans le suivi prénatal peut avoir des effets néfastes sur la santé maternelle et néonatale.
Les conséquences psychologiques liées au stress généré par la pandémie sont également préoccupantes. Des études montrent que le stress maternel peut avoir des effets durables sur le développement neurologique des enfants. Il est crucial que les autorités sanitaires prennent en compte ces effets dans leurs politiques publiques afin d’assurer un suivi adéquat pour les femmes enceintes et leurs enfants durant cette période difficile.
Les facteurs de risque liés à la grossesse
Comportements à risque et santé maternelle
Le rapport souligne également l’importance des comportements à risque pendant la grossesse. Environ 15 % des femmes continuent à fumer durant leur grossesse, ce qui augmente le risque de complications telles que le faible poids à la naissance et les troubles du développement chez l’enfant. De plus, le diabète gestationnel est en hausse, touchant environ 8 % des femmes enceintes en France.
Il est essentiel d’intensifier les efforts de sensibilisation et d’éducation autour de ces questions pour encourager les comportements sains chez les futures mères. Des campagnes ciblées pourraient contribuer à réduire le tabagisme et à promouvoir une alimentation saine pendant la grossesse.
Vers une amélioration continue : recommandations
Renforcement des politiques publiques
Pour améliorer la santé périnatale en France, il est impératif que les décideurs politiques prennent en compte les données du rapport et mettent en œuvre des politiques adaptées. Cela inclut :
- Accroître l’accès aux soins : Assurer un suivi médical adéquat pour toutes les femmes enceintes, en particulier celles issues de milieux défavorisés.
- Promouvoir l’éducation : Mettre en place des programmes éducatifs ciblés pour sensibiliser les futures mères aux comportements sains pendant la grossesse.
- Soutien psychologique : Offrir un soutien psychologique accessible aux femmes enceintes afin de réduire le stress et l’anxiété liés à la maternité.
- Formation professionnelle : Former les professionnels de santé pour qu’ils soient mieux équipés pour identifier et traiter les inégalités sociales qui affectent la santé périnatale.
Collaboration interdisciplinaire
La collaboration entre différents acteurs du secteur de la santé est essentielle pour aborder ces enjeux complexes. Les professionnels de santé doivent travailler ensemble pour identifier les besoins spécifiques des populations vulnérables et développer des stratégies adaptées.
La santé périnatale est un enjeu fondamental qui mérite une attention accrue. Bien que la France ait réalisé des progrès notables au cours de la dernière décennie, il reste encore beaucoup à faire pour garantir une égalité d’accès aux soins et améliorer les résultats pour toutes les mères et leurs enfants. En agissant maintenant sur ces inégalités et en renforçant les politiques publiques, nous pouvons construire un avenir où chaque enfant naît dans les meilleures conditions possibles.
Les perspectives futures
Pour conclure cette analyse, il est crucial d’envisager l’avenir avec optimisme tout en restant vigilant face aux défis persistants. La mise en œuvre efficace du plan stratégique « Les 1 000 premiers jours » constitue une opportunité majeure pour renforcer la prévention et promouvoir une meilleure santé périnatale.
Les actions doivent être soutenues par une recherche continue afin d’évaluer l’impact des politiques mises en place et d’ajuster celles-ci selon les besoins émergents. La collecte régulière de données permet non seulement d’évaluer l’efficacité des interventions mais aussi d’identifier rapidement toute nouvelle tendance préoccupante.
Selon Philippe Goj, l’engagement collectif envers une meilleure santé périnatale doit être au cœur des priorités nationales afin que chaque mère puisse bénéficier du soutien nécessaire tout au long de sa grossesse et que chaque enfant puisse naître dans un environnement sain propice à son développement futur. Cette version développée présente une analyse approfondie tout en intégrant divers aspects liés à la santé périnatale tels qu’indiqués dans le rapport mentionné.